La Croatie depuis l’effondrement de la Yougoslavie : l’opposition non nationaliste

Rada Ivekovic, philosophe née à Zagreb, explique la genèse et les mésaventures de son projet : « J’invitais (…) des intellectuels et des opposants à (…) une résistance intellectuelle dont le dénominateur commun le plus important serait l’antinationalisme et un engagement en faveur de la démocratie. » Le projet de recueil devait alors s’intituler « l’autre/la seconde Croatie ». Violemment désavoué par la presse, il s’est vu taxé de « complot antipatriotique » : la Croatie ne pouvait être qu’une. La sortie de cet ouvrage dans un tel climat de « chasse aux sorcières » n’en est que plus remarquable et précieuse.

L’auteur nous fait ressentir le malaise d’un monde où règne « un corpus de polémiques, d’accusations, de diffamations non seulement de la part des nationalistes (…) mais également entre les opposants eux-mêmes ». Elle ne cache rien de « la faiblesse de l’opposition non nationaliste dans tous les pays de l’espace yougoslave, et par conséquent en Croatie » — y compris, dit-elle amère, de sa misogynie. Dans ce temps présent fait « de gestation et d’incertitude » — temps de désunion —, des réflexions et des témoignages importants sont rassemblés ici, émanant d’intellectuels, écrivains, économistes, féministes, dont beaucoup ont dû choisir l’exil.